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mardi 29 janvier 2013

Ouverture du débat à l'Assemblée Nationale sur le texte de loi Mariage pour tous

Séance 2 du 29 janvier 2013


Séance 2 du 29 janvier 2013, à la suite des questions au gouvernement
Début du débat sur le projet de loi Mariage Pour Tous à l'Assemblée Nationale
Discussion Générale

Christiane Taubira (ministre de la justice-PS)
Dominique Bertinotti (ministre de la famille-PS)
Erwann Binet (rapporteur de la loi sur le mariage pour tous-PS)
Marie Françoise Clergeau (rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales-PS)
Jean-Jacques Urvoas (président de la commission des lois-PS)
Catherine Lemorton (présidente de la commission des affaires sociales-PS)
Henri Guaino (UMP)

Réponse de Christiane Taubira puis Dominique Bertinotti puis Jean-Jacques Urvoas contre la motion de rejet préalable déposée par l'UMP

Explications de vote motion de rejet préalable
Corinne Narassiguin (PS)
Philippe Gosselin (UMP)
Jean Christophe Fromentin (UDI)
Noel Mamère (Ecolo)
Alain Tourret (RRDP)
Marc Dolez (GDR)
Vote sur la motion de rejet préalable

Jean-Frédéric Poisson (UMP)
Réponse de Christiane Taubira et Erwann Binet contre la motion de renvoi en commission

Explications de vote motion de renvoi en commission
Sébastien Denaja (PS)
Xavier Breton (UMP)
François Rochebloine (UDI)
Véronique Massonneau (Ecolo)
Alain Tourret (RRDP)
Gaby Charroux (GDR)

Vote sur la motion de renvoi en commission

Question au gouvernement sur le mariage pour tous du 29 janvier 2013





M. Christian Jacob. Monsieur le président, ma question sadresse à M. le Premier ministre.
Inexorablement, le chômage augmente dans notre pays, les usines fermentLa semaine dernière encore, nous avons appris quune usine Goodyear 1 200 emplois risquait de fermer à Amiens.
Lheure est grave, monsieur le Premier ministre, et vous avez choisi de gouverner par diversion. Mais les Français ne sont pas dupes : ils ne comprennent pas votre obstination à maintenir, dans un tel contexte, lexamen du projet sur lextension du mariage et de ladoption aux couples homosexuels. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Renvoyer, qui plus est, la discussion sur la procréation médicalement assistée à un texte ultérieur, dans un mois, est une véritable imposture, monsieur le Premier ministre : vous navez pas le courage dassumer vos choix.
Depuis trois mois, le groupe UMP sollicite lavis du comité national déthique. Le Président de la République vient enfin daccéder à sa demande, mais il le fait trois jours avant lexamen du texte par lAssemblée.

Plusieurs députés du groupe SRC. Menteur !

M. Christian Jacob. Cest un véritable mépris pour elle, un affront. Je vous prends à témoin, monsieur le président : nous allons débattre sur ce texte sans avoir lavis du comité national déthique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Ma question est donc simple, monsieur le Premier ministre. Vous avez peur du peuple
M. Patrick Balkany. Absolument !
M. Christian Jacob.parce que vous nosez pas le consulter par référendum. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vous navez pas non plus le courage dassumer vos choix, notamment sur la procréation médicalement assistée. Je vous demande donc de reporter lexamen de ce texte tant que nous naurons pas reçu lavis du comité national déthique.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille.
Monsieur le député, avant de parler de peur du peuple, je commencerai par vous rappeler que le peuple a besoin dêtre respecté dans les urnes, et que les urnes ont parlé par deux fois (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP) : la première à loccasion de lélection présidentielle en donnant à François Hollande la possibilité de tenir les soixante engagements quil a présentés devant lensemble des Français (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) ; la seconde lors des élections législatives, qui ont confirmé son choix. Et il est bon quun Président de la République tienne ses engagements !
Ensuite, la loi que nous allons discuter, je lespère, en toute sérénité vous pourrez en tout cas compter sur le Gouvernement et lensemble des députés de la majorité pour quil en soit ainsi , porte sur le mariage et ladoption ouverts aux couples de même sexe. Je ne vois pas lintérêt dintroduire de la confusion dans le débat (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) en jouant sur des thèmes qui ne seront pas abordés, en jouant sur les peurs

M. Philippe Meunier. Vous avez peur du peuple !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. pour inquiéter nos concitoyens. Et puisque vous êtes si préoccupés par la crise, ne cherchez pas à alourdir un climat anxiogène sur lequel vous essayez de prospérer. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Enfin, les réformes de société ne sont pas incompatibles avec les réformes sociales. Sinon, en pleine reconstruction, après-guerre, comment expliquer que le général de Gaulle ait pris linitiative daccorder le droit de vote aux femmes (Protestations sur les bancs du groupe UMP), comment expliquer quen 1974, en plein choc pétrolier, Simone Veil ait fait preuve du courage que lon sait ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Erwann Binet. Monsieur le Premier ministre, à lapproche de ce moment historique qui va enfin permettre à tous les couples de bénéficier des mêmes droits

M. Philippe Meunier. Et les droits des enfants ?

M. Erwann Binet. et donc de la même protection par la loi, quelle que soit leur orientation sexuelle, il est important de rappeler les dizaines dannées de combat qui ont mené à cette dernière marche pour légalité de tous les couples et de toutes les familles.
Il y eut dabord un premier pas avec les débats sur le statut des homosexuels, qui aboutit en 1982 à la dépénalisation totale de lhomosexualité, engagement de campagne du candidat François Mitterrand. Plus tard, en 1998, lors des débats précédant ladoption du PACS, la droite avait exprimé une opposition frontale à la reconnaissance des couples homosexuels.
En 2012, pour la première fois, François Hollande, candidat à lélection présidentielle, promet louverture du mariage et de ladoption à tous les couples. Aujourdhui, la volonté politique du Gouvernement et de la majorité parlementaire est dapporter sécurité juridique et protection à toutes les familles, à toutes les formes de famille. Ces longs mois de débats, qui ont permis de sensibiliser tous les Français à cette question, ont fait naître des questionnements, voire de lhostilité. Ces débats ont aussi fait ressurgir une violence, que lon croyait marginalisée.

Mme Valérie Boyer. Oh!

M. Erwann Binet. Monsieur le Premier ministre, pouvezvous nous éclairer sur les conséquences du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe pour les familles homoparentales ? Pouvez-vous également nous indiquer les mesures que le Gouvernement envisage de mettre en oeuvre pour lutter contre lintolérance et les discriminations dont font encore lobjet certains de nos concitoyens, du fait de leur orientation sexuelle ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.)

M. Michel Herbillon. Pourquoi navoir pas répondu à M. Jacob ? (« Mépris ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. vous avez, à mon sens, très bien exposé, et en des termes simples, ce à quoi lAssemblée nationale est invitée cet après-midi, cest-àdire à une nouvelle avancée vers plus dégalité et de droits pour tous les Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.)
Oui, le mariage pour tous était en effet un engagement du Président de la République, précisément la proposition n° 31 de son programme électoral. Cette proposition a donné lieu à un large débat dans la société

Plusieurs députés du groupe UMP. Cest faux !
M. Philippe Meunier. Menteur !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. au cours duquel des opinions contraires se sont exprimées. Nous sommes dans une République où les questions de cette nature provoquent légitimement une discussion et un débat. Mais nous sommes aussi dans une République où le suffrage universel donne mandat aux députés pour trancher et décider. Cest ce que vous allez faire à partir de cet après-midi, et je sais, mesdames et messieurs les députés, que vous le ferez avec la dignité et la sérénité qui conviennent.
Quand on considère notre histoire, on saperçoit quà chaque fois que nous avons fait progresser légalité dans notre pays

M. Philippe Meunier. Ce nest pas un progrès !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. nous avons provoqué des résistances, des craintes ou des inquiétudes. Pourquoi pas ? Elles ont bien le droit de sexprimer ! Mais, une fois que ces lois ont été votées, elles ont été considérées, bien au-delà de ceux qui les avaient votées, comme une vraie avancée, partagée par toutes et tous, et comme un acquis de la société française. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.)

M. Jean-Luc Reitzer. Vous nêtes pas les seuls !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Il en va de même avec le projet de loi sur le mariage pour tous qui, en définitive, prend en compte lévolution de la famille. Ce sont des dizaines de milliers de personnes qui vivent aujourdhui au sein de couples ou de familles homoparentales : des milliers de parents et denfants. Par ce projet de loi, que le Gouvernement a adopté et vous soumet, vous allez pouvoir renforcer les droits des parents et ceux des enfants !

M. Jacques Myard. Cest faux !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Nous nallons pas affaiblir linstitution du mariage, mais lélargir et la renforcer !
(Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je voudrais, pour finir, madresser à Mmes et MM les députés de lopposition.

M. Julien Aubert. Alors regardez-nous !
Plusieurs députés du groupe UMP. Oui ! Regardez-nous !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Vous avez parfaitement le droit dêtre en désaccord avec nous. Mais rappelezvous le débat que nous avons eu, ici même, il y a quinze ans, au sujet du PACS. Cela na pas été facile et des interrogations similaires ont été posées. Eh bien, mesdames et messieurs les députés de lopposition, combien dentre vous mont dit, quelques années après avoir voté contre ce texte,

M. Christian Jacob. À vous, on ne dit rien !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. quils le considéraient
finalement comme une avancée et que nous avions eu raison de le faire voter ?
Mesdames et messieurs les députés de lopposition, je prends le pari que demain, beaucoup dentre vous viendront me dire : « Oui, cest une avancée, et vous avez bien fait ! ».
(Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.)
Je fais pleinement confiance à la majorité et je suis certain que, même au-delà de ses rangs, à la fin du débat, une large majorité de parlementaires adoptera cette réforme, qui garantit légalité entre les hommes et les femmes, mais aussi les droits des homosexuels. La société française et la République française pourront en être fières ! (Les députés des groupes SRC et écologiste se lèvent et applaudissent.)

(Compte rendu de la première question venant du Compte rendu officiel paru au JO)